vendredi 4 septembre 2015

Déflation, création monétaire et autres sujets hasardeux

La baguette du boulanger, en bas de chez vous, doit coûter aux alentours de 0,85€, un peu plus un peu moins selon où vous êtes. La quasi norme culturelle est des voir les prix augmenter, de façon généralisée, un peu partout, un peu tout le temps... Personne ne sera choqué si j'annonce qu'a priori le pain, l'essence, les loyers, les impôts et pas mal d'autres choses, seront un peu plus chers l'an prochain. Cette hausse généralisée des prix (et en théorie des salaires) s'appelle l'inflation.

Le phénomène économique inverse existe, c'est la déflation.

La déflation est souvent "mal vue" par les économistes keynésiens car elle a tendance à se renforcer par un cercle d'action et de réaction. Si les prix baissent, les consommateurs sont incités à différer au plus leurs achats, ainsi le volume d'affaires est moindre, certains y voient une nouvelle incitation à baisser les prix (ce qui reste à voir) ou encore tout simplement un facteur de ralentissement économique.

Toujours sous cet angle on peut voir quelques avantages à l'inflation, en effet, lorsque tout augmente et que tout signifie salaire et prix, les grands perdants sont, in fine, ceux qui ont de l'argent. Et quand on lit ceux qui ont de l'argent, l'illusion est de croire qu'il s'agit des "riches", car il s'agit de ceux qui ont de l'argent pas nécessairement de la richesse.

Un des moyens de créer de l'inflation est tout simplement d'imprimer de la monnaie. Admettons qu'il s'échange uniquement 10 kg de nourriture, et que la masse monétaire en circulation soit de 10 € (en totalité sur tout un pays pour une période donnée), très logiquement on peut supposer que le prix d'1 kg de nourriture soit de 1 €.

Si demain pour la même quantité échangée, on double la quantité de monnaie en circulation, 20 €, la quantité de bien en circulation étant la même, on double très logiquement le prix de chaque bien, on aura probablement un prix de 2 €/kg.

Avant la monnaie, il y avait le troc, ce qui signifie, que je pourrais envisager dans mon exemple qu'il n'y ait pas juste 10 kg de nourriture mais 5 kg de viande et 5 kg de pommes, en supposant que les deux soient également désirables, on aurait un "taux de change" de 1 kg de pommes pour 1 kg de viande. La chose semble parfaite jusqu'au jour où il y a en fait 5 kg de pain, 2 kg de viande et 3 kg de pommes, car si je n'ai que des pommes et désire du pain de quelqu'un qui ne souhaite avoir que de la viande, là ça devient compliqué. La monnaie n'est rien d'autre qu'un moyen de simplifier le troc, à la fin nous sommes tous en train d'échanger nos biens et nos services.

Une des choses les plus distrayantes est d'entendre les grandes théories autour de la monnaie. Parmi elle, très tendance avant que l'euro ne se casse la gueule, donner le contrôle de la monnaie à un gouvernement populiste résoudrait probablement tous les problèmes de la France, de la Grèce, du monde entier... L'euro serait trop fort... Comprenez à travers tous ces messages qu'il faut imprimer des billets.

Naturellement aujourd'hui on imprime rarement des billets dans les pays développés, on procède à des opérations plus sophistiquées de LTRO ou de QE. Le wording est plus sexy, le grand public ne comprend rien, mais il ne se passe pas grand-chose de différent. Plus de détail sur ces pratiques sur la Main invisible.

Faire tourner la planche à billets à deux impacts principaux: augmenter la masse de monnaie et transférer de la richesse.

L'augmentation de masse monétaire est assez intuitive, c'est le premier effet et généralement le seul qui arrive en tête quand on parle de faire tourner la planche à billets. J'ai 100 billets, j'en imprime 100, j'en ai 200... Tout devrait coûter deux fois plus cher et dans le fond pas grand chose ne changerait, si sur chacun recevait autant de billets que ce qu'il a en poche.

Si vous imprimez de la monnaie chez vous vous êtes de faussaires, vous abusez du monopole de l'Etat, en l'occurrence, en Europe, de la Banque Centrale Européenne. Car en général celui qui imprime de la monnaie s'enrichit. En général, il s'agit de l'Etat, il imprime la monnaie puis s'en sert, et comme en payant des voyages en jet privé à Manuel Valls et sa famille on dépense de l'argent, au final c'est l'Etat et ses serviteurs qui s'enrichit (en ayant appauvris les servis)...

Les nouvelles méthodes d'impressions (LTRO / QE) de billets donnent une place aux banques qui généralement prêtent en contrepartie aux états ou s'assurent de maintenir les marchés boursiers à flot pendant que l'économie s'effondre ou stagne.

A ce type de petits jeux d'arrangement comptable, généralement, si quelqu'un gagne de la richesse (ici donc les banques et les états), quelqu'un doit se doit d'en perdre quelque part. Probablement ceux qui détiennent de la richesse ? Oui, dans un sens, mais de la richesse en terme monétaire, c'est à dire du cash, de l'argent sur un compte un banque ou de l'argent à venir (un crédit que l'on doit vous rembourser)...

Dire les riches est faux, si vous détenez quelques millions vous avez probablement diversifié votre investissement en actifs financiers (du coup que quelqu'un maintienne les marchés peut vous arranger), dans l'immobilier et, vous avez probablement une proportion faible de votre richesse sur un compte en banque. En dehors des créanciers, ce sont probablement les classes moyennes qui sont les plus affectées par ce genre de stratégies.

In fine, c'est comme lever un impôt assis sur les créances et les possessions monétaires. Mais ça semble moins douloureux.

Dans tous les cas, si ce n'est que parce qu'on appauvrit les populations, j'ai toujours du mal à saisir en quoi ça augmente la compétitivité du pays. Question ouverte ceci étant dit, avec les commentaires, tout ça.


2 commentaires:

  1. J'ai du mal à comprendre où vous voulez en venir exactement.

    Un peu à l'aveugle, je reprends juste une de vos propositions: l'Etat qui imprime de la monnaie s'enrichit.

    En pratique, non. L'Etat n'imprime plus directement de la monnaie. Il demande à des banques de lui faire crédit en émettant des obligations, qu'il vend à ces banques. Ces banques cèdent où mettent en gage ces obligations auprès de la banque centrale, dans notre cas la BCE, qui leur verse alors le prix de l'obligation, moins des intérêts, des primes ou des frais, en leur remettant des euros qu'elle crée dans une certaine proportion.

    C'est la BCE qui "imprime" les euros. L'Etat, lui, s'endette. Il ne s'enrichit donc pas, sauf s'il dépense son argent en investissements productifs qui, à terme, produiront une richesse.

    Mais, un Etat endetté a une tendance mécanique à dépenser son argent en consommation, ce qui augmente son endettement et, progressivement l'appauvrit en capital: lorsque l'obligation arrive à échéance, il doit soit ré-emprunter pour rembourser, ce qui lui coûte en intérêts, soit vendre les bijoux de la couronne, ce qui lui coûte donc en capital.

    C'est le schéma grecque.

    L'impôt sert à financer l'intérêt de la dette et c'est lui qui opère le transfert de richesse entre le contribuable qui travaille et le banquier détenteur du capital.

    Ce système peut marcher si le banquier réinvestit son argent dans le secteur productif. Si le banquier néglige le productif et va vers le spéculatif, le système présente alors un risque systémique qui devient ingérable en cas de crise, sauf à prélever sur le contribuable une prime qui permettra de couvrir les risques de krach bancaire du type too big to fail.

    Ca, c'est notre schéma actuel: on paye des impôts pour permettre à une aristocratie financière de faire mumuse avec son casino. On les couvre de leurs risques. Mais en contrepartie, les aristos nous finance par le crédit. C'est une sorte de symbiose.

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  2. Mon point n'est pas de venir à un points particuliers mais plus de formaliser du contenu autour de ce qu'est la monnaie et surtout de la limiter à ce qu'elle est.

    J'ai volontairement simplifié la création monétaire dans mon article. Car premièrement les tenant d'une sortie de l'euro avait pour ambition de résoudre une partie des problèmes "à l'ancienne". Et, deuxièmement, si l'on reprend ton schéma, banque centrale --> banques --> achat d'obligation --> état. J'aimerais dire que la banque centrale est une partie de l'état, que de toute manière l'état ne s'intéresse pas à faire du profit, mais juste à avoir de l'argent dans ses caisses, sous cet angle, faire un crédit c'est s'enrichir, dernier point sur ça, pour que le point que tu évoque tienne la route il faudrait que quelqu'un rembourse les crédits à un moment, or le déficit se creuse depuis 30 ans, donc dans les faits le crédit c'est juste de l'argent qui vient remplir les caisses et qu'on ne rembourse pas.

    Le point que tu fais sur le versements d'intérêts à des banques est juste. Et il pose un certain nombre de questions éthiques dans le schéma de fonctionnement actuel.

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