Je fais une petite cure de désintoxication à l'actualité en ce moment, j'essaye donc de lever le pied sur la dose et rentre en contact avec les buzz quelques jours après la vague. Ces quelques jours nous mènent à peu près au moment où, toi, consommateur assidu de réseaux sociaux, Twitter, et Google News tu commences à ne même plus te rappeler le phénomène qui te créait des palpitations trois jours plus tôt.
Ce phénomène en question s'appelle Alessio Rastani, un trader qui a donné une interview dont un extrait est publié ci-dessus. Sa diffusion traduite durant une émission française a pu briser la barrière de la langue et de la culture pour parvenir jusqu'aux oreilles des fabricants de fromage, de pinard de Renault, de plan de relance foireux et de politiques merdiques de régulation des prix de l'immobilier. Oui, ... La France itself.
L'homme explique froidement qu'il est trader, que son métier c'est de gagner de l'argent indépendamment de la situation économique. Celle-ci est pourrie, ce serait stupide de sa part d'agir avec la conviction de l'inverse. A ce point là, certains s'offusquent déjà, comme si la finance de marché pouvait redresser l'économie, comme si poursuivre encore quelques années le doux rêve de dépense qui berce nos énarques serait autre chose qu'une nouvelle fuite en avant.
Les rêves de l'individu incluraient même une récession. On a presque l'impression d'y voir un crime de lèse-majesté, ce serait pratiquement pire que d'affubler Sarkozy d'autres titres que ceux qu'à bien voulu lui donner le Pape. L'individu rêve d'une chose contraire au gentil ordre moral, c'est une chose que l'on accepte pas.
On ne l'accepte pas, mais, en revanche le premier péquenaud réchappé de lobotomie qui parle de démondialisation est pris pour un génie transfiguré. Rétablir les frontières et les barrières douanières pour laisser les pays pauvres crever dans leur merde, payer nos chaussettes à 40 € la paire tout en favorisant les usines et les bleus de travail chez les ch'timi ; voilà un fantasme humaniste tendance, moralement acceptable et récitable en diner mondain.
L'image d'un monde pourri, c'est l'image de cette foule qui vomit son horreur devant la dernière démonstration de franchise qu'on a pu voir passer sur une télé à heure de grande écoute, et encore, on a été obligé d'aller la ramasser à l'étranger. Cette foule écervelé gémit sa peur d'une réalité qu'elle ne veut toucher, elle préfère rester grise de ses illusions, grise de ses principes qu'elle se refuse d'appliquer à elle-même et de son égocentrisme plébéien.